Où en est l’open data dans le Grand Sud-Ouest ?

Cinq ans après le lancement par l’Etat de son portail data.gouv.fr, l’ouverture des données publiques progresse à l’échelon local. Où en sont les collectivités en matière d’open data dans la nouvelle région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes ? Etat des lieux.

Dans quelques mois, le sort des collectivités en matière d’open data sera fixé par la loi. Actuellement en discussion au Parlement, la loi pour un Etat numérique (dite loi Lemaire) entend définir la manière dont les administrations doivent ouvrir leurs bases de données aux internautes.

Où en sont les collectivités de la grande région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes dans ce domaine ? Quelles sont les informations qu’elles rendent accessibles et réutilisables par les citoyens et les entreprises ?

À Agen, le maire de la ville, Jean Dionis, a inscrit dès 2014 le lancement d’une démarche open data dans ses engagements de campagne. Un peu plus d’un an après, en 2015, la ville a enclenché la libération de ses données.

Pour le maire, l’open data est avant tout un moyen efficace de bien gérer sa municipalité, et un processus qui permet d’attirer les startups à Agen. « C’est un point très positif pour le territoire, ces entreprises engendrent un certain dynamisme », explique Jean Dionis. Financièrement, l’open data n’a pas demandé un effort particulier à la municipalité. Si le maire se dit satisfait de la démarche engagée par sa ville, il estime qu' »il faudrait faire beaucoup plus pour expliquer aux maires pourquoi l’open data est important. »

Les thématiques de l’open data dans le Grand Sud-Ouest

Pour l’heure, Agen fait figure d’exception. Seules cinq autres communes et quatre collectivités locales (tous échelons confondus) du Grand Sud-Ouest s’appliquent à mettre à disposition leurs données sur des thématiques très variées.

“Pour l’instant, l’Etat n’a pas dit quelles données étaient obligatoires, on est plutôt dans l’incitation”, explique Jean-Marie Bourgogne, président de l’association OpenData France.

Depuis le 9 octobre 2013, elle réunit les collectivités engagées dans l’ouverture de leurs données. Elle a publié une sorte de vade mecum recensant les jeux de données « prioritaires » à publier pour répondre idéalement aux exigences de la loi NOTRe. Cette loi adoptée en août 2015 fixe de nouvelles obligations pour les communes et leurs EPCI (intercommunalités) en matière d’open data.

Les recommandations du vade mecum d’OpenData France permettent d’évaluer la qualité de la démarche des collectivités du Grand Sud-Ouest au regard des données déjà accessibles sur leurs portails open data.

On s’aperçoit que, à l’image du maillage inégal du Grand Sud-Ouest en matière de portails open data, les  données libérées par thématiques ne suivent pas vraiment de logique particulière. La quantité de données libérées n’est pas relative à la taille du territoire auxquelles elles se rapportent, et les jeux de données sont présents par thématique de façon assez aléatoire et irrégulière.

Une autre évaluation peut également être effectuée pour mesurer le niveau de transparence des institutions publiques dans la philosophie d’une gouvernance plus ouverte. Les associations OpenData France et Regards Citoyens insistent sur trois catégories de données à libérer jugées primordiales d’un point de vue « citoyen » : les subventions, le budget et les délibérations politiques.

Dans le Grand Sud-Ouest, de tels jeux de données sont rarement présents dans les portails open data.

Pour Tangui Morlier, administrateur de l’association Regards Citoyens, la démarche open data des collectivités locales doit s’inscrire dans un “principe de bienveillance envers les citoyens” : les individus doivent avoir accès aux données le plus facilement possible quand ils le souhaitent.

« Aucune discrimination ne doit être faite, ni économique, ni juridique ou encore technique. Les données ne doivent pas être réservées aux seules personnes détenant le pouvoir économique et aucune distinction ne doit être faite entre les différentes réutilisations juridiques des données. La réutilisation ne doit pas faire non plus l’objet d’un logiciel particulier », explique Tangui Morlier.

Il poursuit : “Majoritairement, les collectivités respectent la gratuité et la non-discrimination juridique. Des problèmes perdurent autour de la technologie : certaines institutions optent pour des logiciels plutôt que des formats ouverts.”

Données temps réel : Bordeaux Métropole en avance sur ses voisins

Dans le Grand Sud-Ouest, pas de problème de format ou d’accessibilité. Les administrations utilisent toutes une licence ouverte (que ce soit la licence ODbL ou licence ouverte d’Etalab) et publient leurs données sur un portail à la navigation intuitive, que ce soit un portail dédié ou sur le portail de l’Etat data.gouv.fr.

Une autre revendication importante de l’association Regards Citoyens est d’inscrire dans l’article 1ter de la loi Lemaire la notion de mise à jour régulière, en plus de la simple “mise à disposition” des données “dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé”.

La simple présence des jeux de données n’est pas suffisante, car des données à l’instant T ont une durée de vie limitée. Selon Pascal Romain, instigateur de la Ressourcerie data locale (Gironde), « l’idéal serait pour les collectivités territoriales d’actualiser leurs données tous les ans, mais tout dépend bien sûr de la typologie du jeu de données ».

Bordeaux Métropole présente quant à elle une originalité par rapport aux autres portails du Grand Sud-Ouest : la collectivité diffuse certaines données en temps réel, comme les places de parking disponibles ou les horaires de tramway. L’exemple de Bordeaux Métropole préfigure-t-il les usages du futur en matière d’open data ?

Jennifer Biabatantou, Clara DelenteBlandine Le Page

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