Making-of de l’enquête : « Gironde : le foncier comme arme verte »

L’enquête

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L’intention première

Le sujet sur les espaces naturels sensibles part d’un constat simple : les Girondins payent sur les permis de construire et sur les aménagements immobiliers une taxe qui sert à acquérir et entretenir des terrains dédiés à la protection et à la valorisation de l’environnement. Cependant, rares sont ceux qui savent ce qu’est un ENS (Espace Naturel Sensible), à quoi il sert et comment est utilisée la taxe. Nous avons donc choisi de réaliser un article de décryptage sur cette politique qui reste méconnue.

Jeu de données

Nous avons démarré notre enquête avec comme seul indice une base de données du Département de la Gironde comprenant toutes ses propriétés foncières. De toutes sortes : les établissements d’éducation, de santé, les parcelles dédiées à la mobilité, à l’économie, aux services… Et, entre autres, les parcelles dédiées à la « protection et à la valorisation de l’environnement ». Sur 3168 propriétés du Département de la Gironde répertoriées, les parcelles dédiées à cette catégorie représentent 1659 parcelles, soit 52,4% des parcelles de la base de données.

Plus de la moitié des parcelles du plus vaste département de France serait-elle donc dédiée à la protection de l’environnement ? C’est à partir de ce constat que nous avons décidé de nous pencher exclusivement sur la politique environnementale du département de la Gironde, et pus précisément sur leur politique autour des espaces naturels sensibles.

Très vite, nous nous sommes rendus compte que la base de données dont nous disposions alors ne suffirait pas. Nous nous sommes donc lancés à la recherche de bases de données supplémentaires, tant pour étoffer et croiser les chiffres dont nous disposions jusqu’alors que pour avancer dans la compréhension de notre sujet. En fouillant dans les différents portails, en questionnant les sources techniques habilitées à nous fournir des informations, et en extrayant des données des différents pdf avec l’excellent outil Tabula, ainsi qu’avec l’aide des intervenants Gary Dagorn (des Décodeurs du Monde) et Frédéric Sallet (du journal Sudouest).

Notre principal obstacle : problématiser le sujet

Dans la phase de pré-enquête, le plus difficile fut de débroussailler le sujet. Entre les abréviations, les types de classement, les différentes échelles d’actions (communes, intercommunalités, département, région), et les différentes politiques entre les départements, la phase de pré-enquête s’est avérée plus ardue que prévue. Mais c’était un travail nécessaire pour rendre le sujet (assez touffu et plutôt opaque à la base pour le lecteur non-initié) clair, bien cerné et bien expliqué pour le grand public.

Dans un deuxième temps, au fur et à mesure que nous avancions dans notre enquête, notre principale difficulté a été de problématiser tout le contenu que nous avions entre nos mains. Après avoir cherché et trouvé des informations supplémentaires, après avoir extrait des bases et des jeux de données complémentaires, nous devions encore chercher la question pour laquelle nous détenions désormais la réponse. Cette phase, qui semble d’apparence si facile, revêt une difficulté particulière à mesure que l’enquête avance.

Contacts

Notre sujet, à l’origine, se prête volontiers à une enquête portée exclusivement sur du traitement de données et de la recherche d’informations sur le web. Mais derrière ces milliers de chiffres et toutes ces cellules de tableur, se cachent des hommes et des femmes. Une enquête, complètement désincarnée, ne saurait pas en être une. Nous avons donc contacté des personnes ressources pour nous aider à bien cerner le sujet.

  • Philippe Barbedienne, président de la Sepanso 33, a été la première de ces sources.

Ensuite, évidemment, il fallait consulter aussi les sources institutionnelles.

  • Nous avons donc contacté Magali Cresté, responsable de la gestion intégrée des milieux naturels et des paysages au Conseil Générale de Gironde, avec qui nous avons réalisé un long entretien.

Simultanément, nous avons aussi fait appel à une source technique pour nous transférer des informations issues de la base de données du Conseil Général afin de compléter, recouper et affiner nos conclusions.

Visualisation

Notre idée de base, en terme de visualisation des données récoltées, était de créer une carte des différentes parcelles propriétés du département en Gironde. Ainsi, le lecteur aurait pu identifier rapidement et clairement l’ENS qui l’intéressait, ou la parcelle la plus proche de chez lui. Mais cette première idée a été malheureusement avortée à cause d’un obstacle majeur : nous ne disposions pas des données géographiques nécessaires pour l’édition d’une telle carte (adresses pour générer des coordonnées de localisation).

A partir des données dont nous disposions il aurait été possible de mener un tel travail manuellement, en entrant les données cartographiques de chaque parcelle manuellement dans le cadastre gouvernemental pour en tirer les coordonnées géographiques… Mais répéter l’opération sur 1659 parcelles aurait été chronophage et contreproductif.

Une deuxième idée nous est alors venue à l’esprit. Nous nous sommes dit qu’à défaut de pouvoir retrouver les parcelles les plus proches de chez lui, le lecteur pourrait au moins s’identifier en tant que Girondin, et comparer les résultats de la politique d’ENS du plus grand département de France avec les données des autres départements français. Mais là aussi, deux obstacles nous ont trop vite barré la route : d’abord, un gouffre. Un vide. Le manque de données cartographiques relatives à ces ENS est consternant pour des institution publiques de services comme les conseils départementaux. Ensuite, le manque de temps : même si nous avions réussi à récolter manuellement toutes les données, nous aurions perdu trop de temps à les entrer manuellement dans une base de données pour pouvoir ensuite les cartographier.

En fin de compte, nos visualisations reposent tant sur des cartographies représentatives que sur des tableaux et graphiques. Avec toujours pour objectif de détecter les usages de lecture du grand public afin de les prévenir au mieux.

Vincent Chevais, Elliot Raimbeau, Clarisse Martin et Patxi Vrignon-Etxezaharreta