Making-of de l’enquête « Accessibilité des lieux de santé : Bordeaux à la traîne »

L’enquête

https://2016.datajournalismelab.fr/accessibilite-des-lieux-de-sante-bordeaux-a-la-traine

L’idée de départ

Nous avons voulu travailler sur l’accessibilité des handicapés aux lieux de santé et notamment ceux situés dans le vieux Bordeaux où les bâtiments inscrits au patrimoine sont nombreux. En effet, la loi du 11 février 2005 oblige tous les lieux recevant du public à être accessibles aux personnes handicapées. Cependant, les lieux de santé du centre de Bordeaux ne sont pas toujours adaptés et nombreux sont ceux qui demandent des dérogations. Notre but était donc de montrer que ces dérogations obligeaient de nombreux handicapés moteurs à déserter les cabinets de certains spécialistes au profit d’autres, plus éloignés et parfois moins compétents sur leurs pathologies.

Nous nous sommes rapidement intéressées aux locaux médicaux situés dans un périmètre que nous avons défini préalablement. Il regroupe une partie du centre historique de Bordeaux, à partir du Cour Alsace-Lorraine jusqu’à la place Gambetta. Nous avons ainsi pu voir par nous même les lieux de santé accessibles et rencontrer des professionnels de santé comme des kinésithérapeutes. Ces données récoltées, nous les avons comparées avec celles dont nous disposions au départ grâce à la plateforme « Bordeaux Accessible ».

À partir de cette comparaison, il paraissait évident que la question de l’accessibilité des handicapés était négligée par les professionnels de santé du centre de Bordeaux. Nous avons appuyé notre enquête en donnant la parole à plusieurs acteurs concernés par ces problèmes. Qu’ils soient adjoints au maire, trésoriers d’une association ou jeunes handicapés, ils sont tous concernés par le manque d’accessibilité et nous ont permis de mieux cerner notre travail sur les données.

Données de départ

Nous sommes partis d’un tableur Opendata suivant http://opendata.bordeaux.fr/content/lieux-accessibles. Celui-ci regroupe l’ensemble des établissements recevant du public (ERP) accessibles à Bordeaux. Pour compléter ces données, nous avons contacté Laurent Hodebar, anciennement chargé de ces questions à la mairie de Bordeaux. Ce dernier nous a redirigé vers la plateforme « Bordeaux Accessibilité » (http://accessible.bordeaux.fr/#page_maps?type=SANTE&title=Sant%C3%A9) qui nous a permis de voir plus précisément la localisation de ces lieux de santé.

Collecte de données sur le terrain

Pour mieux comprendre la portée de ces données, nous avons été sur place voir les lieux de santé accessibles dans le vieux Bordeaux. Mais après une enquête de terrain, nous nous sommes rendus compte que les informations de « Bordeaux Accessible » étaient loin d’être exhaustives. Certaines informations étaient incomplètes et parfois même fausses. Certains lieux marqués comme « accessibles » ne l’étaient pas ou n’existaient plus. Nous avons donc décidé d’élaborer notre propre échantillon de données. Puis nous avons fait un tableur Excel et une carte grâce au logiciel Google Fusion Table. Nous y avons regroupé les données produites par la mairie en pointant les erreurs du document et avons superposé nos informations dans une autre couleur. https://docs.google.com/spreadsheets/d/1ROHJVfx_aI7LWl1Yc0ZIgwiIht2JgUUbB_icmdr8w1I/edit#gid=0

Entretiens et rencontres

Parallèlement, nous avons rencontré Hugues Chiquet, un lycéen de 17 ans handicapé moteur qui est confronté régulièrement aux problèmes d’accessibilité des lieux de santé. Il a accepté que nous le suivions lors d’un rendez-vous chez son psychiatre. Ainsi nous avons pu voir et filmer les obstacles qu’il rencontre. Il ne peut pas se rendre tout seul chez ce spécialiste. Les portes sont trop lourdes, la sonnette trop en hauteur, l’ascenseur étroit… Il rencontre ce genre de difficultés dès qu’il consulte un médecin. Son fauteuil ne lui permet pas l’accès de bon nombre de lieux de santé.

Nous avons aussi contacté le GIHP (Groupement pour l’Insertion des personnes Handicapées Physiques) Gironde et rencontré Dominique Helgorsky, sa trésorière. Elle nous a expliqué les revendications des associations et les problèmes de non application de la loi du 11 février 2005. L’APF (l’Association des Paralysés de France) nous a aussi aidé à mettre en lumière les problèmes d’accessibilité dans les lieux de santé.

Enfin, nous avons rencontré plusieurs professionnels de santé, principalement de kinésithérapeutes pour connaître leurs regards sur la mise aux normes de leurs cabinets et, parfois, les difficultés de celle-ci. Guillaume Fourgeaud, rue des Bahutiers et Olivier, kinésithérapeute place Gambetta nous ont renseigné sur leurs rapports aux questions d’accessibilité des handicapés moteur.

Nous avons enfin eu un entretien avec Joël Solari, adjoint au maire chargé des handicapés et de facto de l’accessibilité de ceux-ci. Nous voulions connaitre l’action concrète de la mairie dans ce processus. On s’est rendu compte du manque de moyens humains qui entrave le travail de l’adjoint au maire. Ils ne sont que trois à être en charge des questions liées aux handicapés. Peu de moyen pour beaucoup de volonté d’action.

Choix éditoriaux

Notre article est basé sur plusieurs vidéos qui nous permettent de jalonner les étapes de notre réflexion. Pourquoi? Non seulement pour apporter un aspect humain à notre travail mais aussi pour montrer les acteurs impliqués dans les problèmes d’accessibilité à Bordeaux. Notre but était de réaliser un article multimédia dans lequel différents formats se répondent pour le rendre plus vivant. Une partie écrite étoffe les points soulignés par les vidéos.

Enfin, une carte interactive réalisée grâce à notre enquête permet de visualiser les données récoltées. Nous les avons ensuite comparées avec les données déjà produites par « Bordeaux Accessible »

Yaël Benamou, Manon Derdevet, Jadine Labbé Pacheco